Ce court texte a été rédigé en anglais par le père Clarence d’Entremont et publiés dans le Yarmouth Vanguard le 20 février 1990. Traduction de Michel Miousse
À part les trois cloches de la Forteresse, il y en avait d’autres à Louisbourg au temps des Acadiens.
Au Monastère de Sainte Claire, il y en avait deux, la Cloche Marie Joseph et la Cloche Georges Angélique. Ce monastère fut fondé par les Pères Récollets, dont je vous ai parlé à maintes reprises. Ils sont arrivés en Acadie en 1630, étant les premiers prêtres de la région de Cap Sable, où ils avaient un monastère qui fut érigé pour eux par les membres de la Compagnie de la Nouvelle France, aux Buttes de Sable de Villagedale, dans le Comté de Shelburne, près du Fort Saint-Louis dont je vous ai parlé dans mon article No. 43. Ils auraient établi ici un évêché si leurs supérieurs en France, n’avaient pas rejeté le projet ; ça aurait été le premier au Canada. C’était au temps de Charles de La Tour. Leur monastère fut incendié à l’automne 1642 par Charles d’Aulnay, en même temps que le fort. Ils étaient de la Province d’Aquitaine, le nom qui avait déjà été donné à la partie sud-ouest de la France ; alors que les Pères Récollets qui ont érigé le monastère Sainte-Claire venaient de la Province de Bretagne. Ils sont arrivés à Louisbourg de Placentia, Terre Neuve en 1714, après le Traité d’Utrecht. Leur chapelle a servi d’église de paroisse jusqu’en 1730, et même après.
La Cloche Marie Joseph fut bénie le 19 février 1724. Elle a pris son nom de sa marraine, Mademoiselle Marie Jeanne Le Moreau, de La Rochelle, et de son parrain, Joseph Lartigue, marchand et membre du Conseil Suprême de Louisbourg. Elle pesait 30 livres.
La Cloche Georges Angélique fut acquise plus tard, en 1757 seulement. Elle venait d’un vaisseau anglais qui avait été capturé par le Capitaine La Croix, un boucanier des côtes de l’Acadie. Elle pesait 100 livres. Elle fut bénie le 12 septembre de cette même année. Elle avait comme parrain Sieur Georges Grondin et comme marraine Dame Angélique Grondin, sœur du Capitaine La Croix, qui lui donnèrent leurs noms. Malheureusement, cette cloche n’allait être entendue que pendant moins d’une année, parce que le 26 juillet de l’année suivante, Louisbourg tombait aux mains des Anglais.
Il n’existe aucun compte rendu de ce qui est arrivé à ces deux cloches. Il y a eu une cloche à Chester, faite en France en 1700 et qui appartenait à un monastère. Il y avait une longue inscription latine dessus et ses rebords étaient ornementés d’une couronne de fleurs très bien entrelacées. En 1840, lorsqu’une nouvelle église fut érigée, une cloche nouvelle et plus grosse fut installée. La cloche du monastère fut par la suite mise dans un vaisseau, qui pêchait aux Grands Bancs, pour être utilisée comme cloche d’alarme. Elle fut ramenée à Chester, où elle demeura pour un temps, on s’en servait pour annoncer un événement heureux comme introduire le Nouvel An, proclamer un mariage, etc. Elle fut ensuite installée au-dessus d’un poste, à bord d’un superbe vaisseau, le Peerless.
Ce vaisseau fut finalement vendu, et nous avons perdu la trace de cette cloche par la suite.
Quinze ans plus tard, le Peerless fut retrouvé à Valparaiso, Chili, par celui qui avait été son chef contremaître en Nouvelle Écosse ; il avait été converti en ponton pour le charbon, il y avait toujours la même cloche au-dessus du poste.
Nous avons toutes les raisons de croire que cette cloche Française d’un monastère, qui avait échoué, d’une manière ou d’une autre à Chester, était une des cloches Françaises du Monastère Sainte-Claire à Louisbourg.
À Louisbourg, le King’s Hospital avait aussi sa cloche. Cet hôpital, fait de pierres, semble avoir été construit en 1716, alors que les Frères de la Charité de St-Jean de Dieu le prirent en charge. Sa cloche était appelée dans les documents, « La cloche de l’Institut. » Elle était suspendue sur un mur extérieur de l’aile gauche, face à la cour. Elle servait à annoncer le divin office, les repas, les heures de travail et certains évènements importants.
Il y avait encore une autre cloche à Louisbourg, celle de la paroisse Notre Dame des Anges, fondée en 1722 par les Pères Récollets. Elle avait sa cloche et même deux, une dans chacun de ses deux clochers.
Nous ne savons pas ce qui est advenu de ces cloches, pas plus que de celle de l’hôpital. En 1878, fut trouvée dans les ruines de Louisbourg, une cloche qui fut prise par le capitaine de la barque « Le Moselle. » Y étaient inscrits la date 1674 et les mots « Franco Nicolas Sol de Salvador Lorenzo. » Il y avait une croix de chaque côté. Plusieurs théories ont été avancées pour expliquer l’origine de cette cloche. Quelques-uns ont dit qu’elle devait avoir appartenu à un vaisseau des Îles Espagnoles qui faisait le commerce avec Louisbourg. Elle pourrait très bien avoir été la cloche d’un des édifices de Louisbourg, civil ou religieux.
Nous retrouvons d’autres cloches aussi, ailleurs au Cap Breton à l’époque des Acadiens. À Ingonish, maintenant dans le Comté de Victoria, qui fut fondé en 1720, une église fut construite en 1729, alors qu’elle reçut, cette même année, une cloche à laquelle fut donné le nom de Jean Françoise (anglicisé John Frances.) Elle avait une longue inscription en français que je vous traduis : « Pour la paroisse d’Ingonish je fus nommée Jean Françoisse par Jean Decarette et par Françoisse Vrail, parrain et marraine. Le fosse Huet m’a fait en 1729. »
Après la conquête de l’île en 1758, ce ne fut qu’en 1849 qu’elle fut déterrée sur le site où l’église se trouvait. Elle était encore en parfaite condition. Elle fut emportée à Sidney, et c’est à peu près tout ce que nous savons d’elle maintenant, bien qu’un auteur, J.G. Bourinot, écrit en 1892 qu’elle fut emportée en Nouvelle Angleterre, où la plupart des reliques de ce genre à l’époque se retrouvaient.
Une autre paroisse importante à Cap Breton était Sainte Anne, aussi dans le Comté de Victoria d’aujourd’hui. La fondation elle-même remonte à 1629. Mais ce ne fut qu’en 1716 qu’une église y fut érigée par les Pères Récollets. Elle avait sa cloche aussi, bien qu’elle était toute petite.
La Cloche Sainte Anne de l’Île Royale (L’Île Royale était le nom donné au Cap Breton.) On ne sait pas ce qui est arrivé à cette cloche.
Mais en 1903, un auteur du nom de C.W. Vernon, disait que la cloche utilisée dans cette église fut retrouvée plusieurs années auparavant et fut emportée aux États Unis.
La semaine prochaine, nous verrons ce que nous pourrons trouver aux environs du Bassin des Mines et de l’Isthme de Chignectou.