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47. LA « CROIX FRANÇAISE » À MORDEN, N.É.

Ce court texte a été rédigé en anglais par le père Clarence d’Entremont et publiés dans le Yarmouth Vanguard le 21 novemnbre 1989. Traduction de Michel Miousse


Sur les rives de la Baie de Fundy, dans le Comté de King, à pas plus de 5 miles de la frontière du Comté d’Annapolis, se trouve le petit village de Morden, appelé autrefois « Croix Française*. » On peut trouver là, près de la plage, une croix faite de pierres de plage ovales, le tronc de celle-ci mesurant 7 pieds de haut et 2 pieds et ¾ de largeur ; ses bras mesurent 4 pieds et ¾. Elle est connue sous le nom de « Croix Française. » Il y a deux plaques fixées à cette croix ; sur l’une d’elle, il est écrit Croix Française – 1755 et sur l’autre, Croix Française. La tradition nous dit que sur ce site, des Acadiens de Belle Isle passèrent l’hiver 1755-56 et au printemps de 1756, Pierre Melanson et un jeune Amérindien traversèrent la Baie pour demander de l’aide, il y est mort lors de son voyage de retour.


En 1755, la tâche d’appréhender les Acadiens de la Rivière Annapolis pour les envoyer en exil fut confiée au Colonel John Handfield, qui dans sa correspondance, exprime plus d’une fois le déplaisir que lui cause cette tâche ; la grand-mère maternelle de sa femme, Elizabeth Winniet, était Acadienne, Madeleine Bourque, qui avait encore plusieurs connaissances à Annapolis ; son grand père était Pierre Maisonnat, le « Baptiste » dont je vous ai parlé dans deux de mes articles précédents, No. 10 et No. 11.


Le 12 septembre 1755, les Acadiens de la Rivière Annapolis apprirent ce qui était arrivé quelques jours avant aux Acadiens de Grand Pré. Immédiatement, quelques-uns d’entre eux, spécialement ceux qui habitaient en haut de la Rivière, eurent le temps de s’échapper avant que Handfield fut en mesure de les rejoindre, spécialement ceux de la région de Belle Isle, constituant environ 20% de la population. Belle Isle, qui porte toujours ce nom, est située à mi-chemin entre Annapolis et Bridgetown. Ils étaient environ 300 en tout. Afin de ne pas être découverts, au lieu de suivre la Rivière ou la route qui menait à Bassin des Mines, il prirent à travers bois, ayant la route


à leur droite et la montagne à leur gauche.


Après avoir voyagé près de 25 miles avec leurs bagages sur les épaules, leurs bébés dans les bras et les personnes âgées dans des charrettes de fortune, épuisés, il s’arrêtèrent dans la plaine de Aylesford, à environ un mile à l’est de Kingston, selon la tradition.


Il est dit qu’ils restèrent à cet endroit environ un mois, mais il semble que c’était plus près de deux mois. La nourriture qu’ils avaient emportée avec eux ne fit pas long feu. Ils furent contraints de manger des baies, de l’herbe et des fruits sauvages. En conséquence, certains d’entre eux décédèrent de dysenterie (sic.) C’est un endroit que les premiers colons Anglais appelèrent le « Cimetière Français. »


Quelques-uns ont dit qu’ils ont passé l’hiver sur place, mais, étant donné les circonstances, cela semble impossible.


Ce qui s’est passé plutôt, c’est que lorsque la première neige se mit à tomber, ils ont décidé d’aller de l’autre côté de la montagne sur la rive de la Baie de Fundy, d’où ils auraient la possibilité de contacter d’autres Acadiens de leur connaissance qui, grâce aux Micmacs purent se cacher dans l’Isthme de Chignectou. Ce fut aussi grâce aux Micmacs qu’ils purent trouver leur chemin vers la rive. Les Amérindiens leurs avaient parlé de la région de Morden, parce qu’elle était au même niveau que l’eau, exempte de falaises, contrairement à plusieurs régions le long de la rive. Bien que la distance n’était que de six miles, c’était toute une tâche d’atteindre cet endroit, faibles comme ils l’étaient du manque de nourriture, particulièrement pour grimper la montagne.


La plaque indique que ce fut au printemps que Pierre Melanson et le jeune garçon Amérindien traversèrent la Baie, pour être en mesure de prendre contact avec les Acadiens qui n’étaient pas très loin. Mais, comme c’était précisément pour cette raison qu’ils étaient venus à Morden, il semble plus probable qu’ils aient essayé d’entrer en contact avec eux aussitôt que possible. De toute façon, Pierre Melanson et le jeune Amérindien traversèrent jusqu’à Cap Chignectou*, à environ 16 miles de Morden, jusqu’à une Anse connue depuis sous le nom de « Anse aux Réfugiés*. » Ce qui arriva par la suite, nous ne le savons pas. Probablement trop épuisé pour faire quoique ce soit d’autre, Pierre Melanson devait revenir à Morden où il décéda dès son arrivée.


Concernant ceux qui allaient passer l’hiver dans cet endroit abandonné et isolé, les mots veulent que nous décrivions les mauvaises conditions qui allaient être les leurs. Ils se firent des abris du mieux qu’ils purent avec des branches, se nourrissant du mieux qu’ils pouvaient, de canards, de goélands, de corneilles, de lièvres, d’écureuils, d’algues et de poissons qu’ils attrapaient à travers la glace. Mais la plupart du temps ils se nourrissaient de coquillages. Le fait est qu’avec les coquillages qui ont été trouvé ici, les autorités furent à même de paver l’entrée du parc qui fut érigé ici. De plus, lors de la construction de l’Église Sainte- Marie* d’Aleysford en 1790, ces coquillages furent utilisés pour faire du plâtre.


Des 300 personnes qui avaient quitté Belle Isle en septembre, il n’en restait plus que 90 à la fin de l’hiver, selon une version et 60 selon une autre version. Au printemps, avec l’aide des Amérindiens, ils traversèrent jusqu’au Cap Chignectou, en un endroit appelé depuis « Pointe Famine* », et de là jusqu’à l’Isthme de Chignectou, avec l’intention de se rendre à Québec.


Avant de quitter Morden, ils érigèrent sur les tombes de ceux qui n’avaient pu aller plus loin, une grande croix noire qui résista aux éléments de la nature jusqu’aux environs de 1860, donc plus de 100 ans.


Après un certain nombre d’années, les habitants de Morden, qui avaient vu la croix de bois, décidèrent d’en ériger une autre afin de maintenir vivante la tradition de cet épisode de l’Expulsion des Acadiens. C’est en 1887 qu’une croix de chêne fut érigée, aussi près que possible de l’endroit où se trouvait la première croix, l’endroit ayant été érodé par les marées. Elle fut remplacée en 1920 par une troisième croix, cette fois faite de pierres de plage rondes.


Comme les gens qui venaient voir la croix augmentaient en nombre, il fut décidé, il y a 25 ans de cela, en 1964, de construire un parc et d’ériger une croix plus artistique, celle dont je vous ai parlé précédemment. Son dévoilement a eu lieu le 29 août de cette même année ; elle fut réalisée par une femme Acadienne résidant à Morden, Madame Denis Boudreau, née Agathe Doucet, de Concession ( Comté de Digby, pas très loin de Pointe de l’Église.) Elle est justement décédée l’année dernière, le 10 mai (1988.)


S’il vous arrive de passer par la Vallée d’Annapolis*, il serait dommage que vous ne fassiez pas un détour de la Route 1, vers Auburn, pour vous rendre à Morden et voir la « Croix Française. »

30. LE PONT QUI ENJAMBE LE CANAL DE L’INDIEN*

Ce court texte a été rédigé en anglais par le père Clarence d’Entremont et publiés dans le Yarmouth Vanguard le 25 juillet 1989. Traduction de Michel Miousse Selon la légende, le nom de ce canal vient

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